Discussion:
Pour la défense des "Onze Commandements"
(trop ancien pour répondre)
Jodel
2004-10-09 14:28:15 UTC
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A base de caméras cachées et de performances physiques, cinq amis (dont
l'extrême Michael Youn) accomplissent les "onze commandements de la blague".
Alors que le premier quart d'heure ressemble, il est vrai, à un plagiat
aseptisé de Jackass ou Dirty Sanchez (MTV), le reste du film parvient à une
certaine forme de cinéma d'émotions. Au-delà de l'absence de qualité d'image
ou du scénario, Les Onze Commandements parviennent à procurer un sentiment
bien plus général, sentiment de jeunesse perdue, de subversion inutile et
désespérée, de jeux dangereux auxquels on ne jouera plus jamais. Peuplés de
petits paris bêtes et dangereux (provoquer des policiers, monter dans une
centrifugeuse, mâcher un piment sans le recracher, transformer une maison en
location en piscine), les "commandements" restent gentils et ne prouvent en
rien une volonté réelle de subversion (exceptée la scène de l'hypermarché,
une des plus puissantes et incitatrice du film). On flirte souvent avec la
petite délinquance, la détérioration de bien privés, la résurrection d'
Adolph Hitler et l'étalement de vomi sur le visage. Derrière tout ça : un
certain artisanat du happening, car 90% du film s'est tourné
clandestinement, sans autorisation. Tout ceci provoque une certaine bouffée
d'air frais, dans un pays droitier asphyxié par l'hystérie sécuritaire.

On retrouve heureusement des gags pour tous publics, gentils et à mourir
de rire, comme celui de l'hôtel de luxe ou de la bibliothèque Beaubourg,
peut-être les plus légers d'un film un peu trop hanté par la douleur
physique. On peut d'ailleurs reprocher au film le défaut opposé à celui
auquel on s'attendait. Il ne manque rien aux Onze Commandements, et au
contraire il a une séquence en trop. Cette scène finale où après avoir
explosé dans un accident de voiture (non réel), nos héros sortent du
véhicule pour se disperser dans une décharge publique. On aurait pu ici s'
arrêter sur l'accident, sur ce van noir, Michael Youn au volant, qui fonce
sciemment contre un mur de béton. La spirale de la délinquance de la
dernière demi-heure aboutirait à la gaffe ultime, la dernière et la plus
forte des blagues possibles : la mort. Une occasion ratée de faire d'un film
burlesque une ode passionnée et philosophique à la rébellion contre soi.

Les Onze Commandements sont bel et bien du cinéma, qui, rappelons-le, ne
veut pas obligatoirement dire scénario, ni même fiction. Pourtant, le
dernier commandement du film « tu chanteras comme un conard » (sic) offre un
grand moment de mise en scène, qui donnerait même toute sa crédibilité au
film. Alors que les performances sont réalisées par François Desagnat et
Thomas Sorriaux (étrangement cachés derrière le pseudonyme des « Réals de
Madrid », sûrement pour se protéger de leur montage bâclé), la scène chantée
a été imaginée par les très talentueux Sp6men (en fait Steven Ada et Eric
Poulet). Réalisateurs de nombreux clips (Dis-moi que l'amour de Marc
Lavoine, Fan de Pascal Obispo), ils se lâchent ici dans le grandiose d'une
mise en scène et d'un montage à mon goût hautement maîtrisés. A un
carrefour, une semi-remorque blanc barre brutalement la route aux voitures.
Klaxons et protestations. Le conducteur s'enfuie après avoir fait un bras d'
honneur aux contestataires. Indignations des automobilistes. L'immense
remorque se découvre et apparaît à la stupeur des gens de la rue une scène
enfumée, du fond de laquelle sortent cinq rockers portant des masques à gaz.
Alors que la chanson commence, Michael et ses complices progressent sur les
toits des voitures micros en mains. Comme le crescendo d'un concert
improvisé, Michael Youn, allongé les bras en croix sur un piano noir, s'
offre à la foule vindicative. Pendant ce temps, avec un baroque qu'on
attendait pas, Vincent Desagnat (bon acteur dans d'autres scènes) mué en
ange tenu par des câbles, voltige au-dessus des voitures tout en leur jouant
de la lyre. Le final live a lieu sur une nouvelle scène circulaire au centre
d'un rond-point embouteillé, avec la chanson chorégraphiée reprise en chour
comme un slogan de "fout-la-merde" : « Notre vraie nature, c'est d'avoir 14
ans ».

Certes on peut trouver qu'on s'approche ici de l'esthétique d'un
vidéo-clip. Mais sur grand écran, enrichi d'un avant et d'un après, d'un
contexte documentaire fut-il comique, la scène prend tout un sens que n'a
pas une simple chanson filmée. On regrettera même que la séquence n'ait pas
remplacé le clip laborieux de la chanson, réalisé par Jan Kounen. Sans
aucune imagination (ce qui est un peu la marque de fabrique du désastreux
réalisateur), le nouveau clip de Comme des conards dessert la chanson plus
qu'elle ne l'avantage. Reste des Onze Commandements l'impression d'un
nouveau cinéma trash, jeune et désintéressé, et de nouvelles sensations que
je n'avais alors jamais resenti de la même façon avec le cinéma
traditionnel.
--
Jodel.
zarak
2004-10-09 15:27:43 UTC
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Mouais... analyse quelque peu longuette de ce qui s'avère simplement
une grosse blague potache bien dans la tendance "destruction et autodestruction",
et comme d'habitude calquée - sans en atteindre le niveau - sur les américains.

Beaucoup de lourdeurs, d'ennui, de mauvais goût et de bonnes idées trés mal
exploitées, mais effectivement deux-trois scènes bien délirantes qui sauvent le film
(serveurs dans l'hôtel, country dans la bibliothèque), et une scène à pleurer qui est
pour moi la seule d'anthologie : Pizza Rocket (et pourtant la plus inoffensive, tiens donc...).

Pour le reste, trop de recyclage et de copiage (et j'en oublie) :

- Le coup de Djibril Cissé : copié sur la bande à Knoxville qui, eux, ne faisaient
pas ça avec un ballon de foot mais avec des oranges lancés avec des chisteras
de pelote basque. Croyez-moi c'était autre chose niveau blessure.
- Le look à Youn copié sur Knoxville
- Les fausses bastons entre les gars du groupe, encore une mauvaise copie de
Jackass.
- Les piments.
- Les blagues scatos.
- Les retapage des murs de la maison parentale d'un des gars du groupe.
- Et puis la reprise facile de My Sharona érigée en tube. Facile pour vendre...
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